Festival d'Avignon: 1947-1963

Date 21/09/05 | Sujet : Histoire

Vilar, "régisseur" au Palais des papes

Pendant 17 ans, le Festival reste l'affaire d'un seul homme, d'une seule équipe, d'un seul lieu, et donc d'une seule âme. La volonté de Jean Vilar est de toucher un public jeune, attentif, nouveau, avec un théâtre différent de celui qui se pratiquait à l'époque à Paris : "Redonner au théâtre, à l'art collectif, un lieu autre que le huis clos (…) ; faire respirer un art qui s'étiole dans des antichambres, dans des caves, dans des salons ; réconcilier enfin, architecture et poésie dramatique".
Jean Vilar s'attache une troupe d'acteurs qui viendra chaque mois de juillet réunir un public de plus en plus nombreux et de plus en plus fidèle. Ces jeunes talents, ce sont Jean Negroni, Germaine Montero, Alain Cuny, Michel Bouquet, Jean-Pierre Jorris, Silvia Montfort, Jeanne Moreau, Daniel Sorano, Maria Casarès. Gérard Philipe, déjà célèbre à l'écran, les a rejoints en 1951 ; il en est resté le symbole, avec ses rôles fameux du Cid (Corneille) et du Prince de Hombourg (Kleist).

Le Festival devient le fer de lance du renouveau théâtral français. Il éclaire et conforte d'autres expériences d'animation théâtrale conduites alors par les pionniers de "la décentralisation" (Jean Dasté à Saint-Étienne, Maurice Sarrazin à Toulouse, Hubert Gignoux à Rennes, André Clavé à Colmar). C'est en province que l'art théâtral se renouvelle par l'action de metteurs en scène, chefs de troupe, envoyés par l'État en mission dans ce qui était tenu, à l'époque, pour un désert culturel. Et Avignon devient autant le rendez-vous de ces pionniers que l’événement culturel de l’été.

L’expérience d’Avignon doit donc se pérenniser ; il convient de donner une scène permanente à Vilar. En 1951, Jeanne Laurent, directrice des Spectacles au secrétariat d’Etat aux Beaux-Arts, qui avait encouragé Vilar avant 1947 et soutenu financièrement la "Semaine d’Art", sait qu’Avignon a réussi, que la politique de décentralisation a conquis un nouveau public. Un comité interministériel voulait un rapport sur le théâtre national ; elle propose qu’il soit consacré au théâtre populaire ; ce qui était possible en province devait l’être pour Paris et sa banlieue. Le comité, sensible à la détermination de Jeanne Laurent, lui donne son accord. C’était le 17 juillet 1951. Elle prend immédiatement le train pour Avignon et propose l’aventure à Vilar. Il hésite, consulte la troupe, finit par accepter. La veille de l’enterrement de Jouvet, il est nommé officiellement directeur du Théâtre national de Chaillot qu’il rebaptise du nom donné par Gémier : Théâtre national populaire. L’équipe d’Avignon sera le noyau du TNP.


Jusqu'en 1963, TNP et Festival ont un seul et même "patron" qui s'appuie sur le travail de militantisme culturel hérité de l'esprit d'après-guerre pour attirer un public nouveau. La démarche s’est orientée vers les associations, les mouvements de la jeunesse, les comités d’entreprises, beaucoup d’amicales laïques… Des milliers de jeunes envahissent la ville, dorment dans des campings, chez l’habitant ; on ouvre des écoles pour les héberger ; dans le verger Urbain V, des débats, des dialogues, des lectures sont organisés ; treize pays participent aux premières Rencontres internationales de jeunes organisées par les Centres d’Entraînement aux méthodes d’éducation active (CEMEA) et le Centre d’échanges artistiques internationaux (CEAI).

L’administration et la troupe qui s’organisent à Paris présentent en Avignon des spectacles qui feront date : Lorenzaccio, Dom Juan, Le Mariage de Figaro, Meurtre dans la cathédrale, Les Caprices de Marianne, Mère Courage, La guerre de Troie n’aura pas lieu…

Et chaque été, au Palais des papes, c'est une liturgie, un rituel, une "communion" qui se déroule.



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